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TRAITÉ DE LA VIE SPIRITUELLE
PRÉFACE DE SAINT
VINCENT FERRIER
Sollicité par des membres plus jeunes de sa famille
dominicaine de composer un ouvrage d'ascétisme, saint Vincent Ferrier déclare ne
pas faire œuvre de doctrine personnelle, mais traditionnelle. Il attache, comme
on le verra, une grande importance à cette déclaration
initiale.
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Matière du traité
Je n'expose dans ce livre que la doctrine traditionnelle des
saints Docteurs. (1)
Cependant, pour établir mes affirmations et pour persuader, je
n'apporte aucune citation de l'Écriture ni de quelque Docteur en particulier :
car je veux être bref.
En second lieu, je ne m'adresse qu'à ceux qui sont désireux
d'être agréables à Dieu.
Enfin : je prétends éclairer les humbles de cœur déjà persuadés,
et refuse toute discussion avec les orgueilleux.
Cet avertissement vaut de l'or. L'auteur n'entend rien
innover. Son ouvrage sera, comme on l'a si bien dit : le résumé, fait par un
très grand saint, de la doctrine spirituelle des saints. À son insu, l'auteur se
donne lui-même en exemple.
Les actes doivent précéder la parole.
Quiconque veut faire du bien aux âmes et les édifier par ses
paroles, doit avant tout posséder en lui-même ce qu'il enseignera aux autres,
sinon il réussira peu. Sa parole demeurera inefficace tant que ses auditeurs ne
le verront pas pratiquer ce qu'il enseigne, et avoir plus de vertus qu'il n'en
exige d'eux.
Ajoutons à cette préface de notre saint, une page
enrichissante de la mystique de l'Orient chrétien.
La parole de l'action vivante.
Isaac de Syrie disait au VIIe Siècle : la parole de
l'action vivante est très différente des mots de la beauté. Car même sans
expérience la sagesse (humaine) sait orner ses paroles et parler de la vérité
sans la connaître réellement. Plus d'un peut parler de la perfection sans en
connaître les œuvres par expérience personnelle. Mais la parole qui procède
de l'expérience est un bijou auquel on peut se fier. Et la parole qui n'est
pas fondée sur le fait est une hypothèse de honte. C'est pour ainsi dire comme
un peintre qui peint de l'eau sur un mur, mais n'est pas en mesure d'étancher sa
soif, ou comme un homme qui fait des rêves merveilleux. Mais celui qui parle de
la vertu par expérience vécue, celui-là donne à ses auditeurs des mots qu'il a
acquis par sa peine, et la leçon qu'il sème dans les oreilles de ceux qui
l'entendent semble sortir du tréfonds de son âme.
(1) L'examen
des sources de ce traité a été fait par Sigismond Brettle dans San Vicente
Ferrer und seine literarische Nachlass (Münster in Westf. 1924). Parmi les
sources ignorées de lui, il faut citer Venlurino a Bergamo qui à
son tour a emprunté à Jacques de Milan O.F.M. : Stimulus amoris. - Ces
indications m'ont été aimablement communiquées par le P. Raymond Creijtens
(Rome). cf. Arcbivum Fr. Praedic. 1950, p. 190.
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